( d’abord en français, ensuite en néerlandais ) par Piotr Rozenski
Il y a un temps pour toute chose sous les cieux. Il y a un temps pour venir, il y a un temps pour partir.
Au cœur battant de la communauté polonaise à Heusden-Zolder, le temps est venu de s’arrêter de battre.
Millenium, le foyer qui pendant pas loin de 60 ans a constitué son lieu de rencontres par excellence, vient d’être vendu à un promoteur immobilier et sera prochainement rasé.
Mais ce qui restera de cette świetlica polska – ou de cette « baraque polonaise », comme on avait l’habitude d’appeler cette construction, originairement en bois – c’est plus qu’un tas de briques, de poutres et de planches : pour d’aucuns elle évoquera des souvenirs affectueux aux temps révolus, pour d’autres il sera synonyme d’un regard nostalgique posé sur leurs années d’enfance…
Retour vers le passé :
La mise en exploitation progressive des mines dans le bassin houiller de Campine après la Première Guerre Mondiale a considérablement accéléré l’afflux de migrants dans le Limbourg. Les Polonais faisaient déjà partie de cette première vague d’immigration.
C’est surtout à partir de 1923 que les Polonais y sont arrivés en masse. Ils étaient essentiellement originaires de la Rhénanie et la Westphalie où ils avaient été employés dans l’industrie minière de la Ruhr. Avant de s’installer dans le Limbourg, certains d’entre eux avaient effectué un bref passage par le Nord de la France ou la Wallonie. Dans les années qui suivent, les exploitants des mines belges ont organisé aussi tous les deux ou trois ans des actions de recrutement en Pologne pour embaucher des mineurs directement dans leur pays d’origine.
C’est essentiellement grâce aux immigrés polonais de la Ruhr ou aux « Westfalaki » comme ils se plaisaient à s’appeler eux-mêmes, que la vie associative dans le Limbourg a pris son essor. Ces pionniers étaient plutôt éduqués et avaient gagné de l’expérience dans la mise en place d’organisations en Allemagne.
Les activités culturelles, religieuses, éducatives, sociales et sportives organisées par les associations polonaises ont fourni un point d’ancrage aux milliers de Polonais qui, au cours des années 1920 et 1930, avaient laissé derrière eux leur quotidien précaire dans leur patrie ou la situation politique pénible en Allemagne. Winterslag, où l’exploitation de charbon avait débuté en 1917, a pris l’initiative de créer un réseau d’organisations polonaises dans le Limbourg en fondant l’Union polonaise en 1923. D’autres sites houillers à Waterschei, Zwartberg, Eisden, Beringen et Heuden-Zolder (communes distinctes jusqu’à la fusion en 1977) ont rapidement suivi. A partir de 1947, dans les camps des DP (displaced persons) en Allemagne, un grand nombre de réfugiés de guerre polonais ont été recrutés pour les mines de charbon du Limbourg. Beaucoup d’entre eux ont aussitôt rejoint les associations.
À Heusden et Zolder, à partir de 1923, seules quelques personnes s’étaient installées pour aider à la construction des premiers puits. La mine de Helchteren-Zolder ne sera mise en service qu’en 1930. Heusden-Zolder comptait donc une communauté polonaise relativement restreinte avant la guerre, mais ce petit nombre était plus que compensé par un fonctionnement nettement dynamique. Une branche du Związek Polaków y a été fondée en 1929, celle du Bractwo Żywego Różańca en 1938. Avant la guerre, la section comptait également un club de sport et de gymnastique (Sokół), une association de tireurs sportifs (Związek Strzelecki) et une école polonaise.
La plupart des associations de Heusden-Zolder ont repris leurs activités après la guerre. En raison de l’arrivée des personnes déplacées, le nombre de familles polonaises a considérablement augmenté. Dans les années 1950, par exemple, 80 élèves fréquentaient l’école polonaise.
Les associations ne disposaient pas de propres locaux. Les membres pour les réunions se retrouvaient dans des cafés ou des cantines locales ou louaient des salles pour les célébrations. Cela a changé au début des années 1960. Le 15 novembre 1964, à l’instigation de Bolek Nowicki, alors président du Związek Polaków, une salle est inaugurée – on ne s’en étonnera guère – dans le quartier des migrants Lindeman, au pied du terril. Le patronat de la mine de Helchteren-Zolder avait apporté une contribution en mettant à disposition une parcelle et les matériaux. À l’occasion des festivités entourant la célébration des mille ans du christianisme en Pologne en 1966, la salle a été baptisée « Millenium ».
Lorsque la salle est devenue la propriété de l’Union polonaise dans les années 1970 et a fait l’objet d’une importante rénovation, elle avait déjà acquis un statut presque mythique, grâce aux fréquentes activités et réunions organisées au fil des ans. Outre la célébration des fêtes chrétiennes et nationales (qui étaient animées par des spectacles, invariablement suivis du traditionnel bal ou zabawa) et les cours de polonais du samedi matin qui se sont poursuivis sans interruption jusqu’en 2008, c’était également le lieu de rencontre des scouts polonais, de la chorale Saint-Grégoire et des groupes de danse : les jeunes du KSMP dans les années 1960 et 1970 et Millenium, un groupe de jeunes adultes, à la fin des années 1970 et dans les années 1980 (qui était également un club sportif).
La troupe de théâtre a également connu le succès, en se produisant depuis 1947 au concours annuel de théâtre du Limbourg et remportant régulièrement des prix.
La świetlica accompagnait les Polonais de Heusden-Zolder et des environs en d’autres occasions : réunions conviviales (wieczorki) autour d’une assiette de kapusta ou de goląbki et d’un verre de wódka, évènements joyeux, tels que mariages, fêtes de communion, anniversaires… Ces dernières années, hélas, de plus en plus souvent autour des tables de café après les cérémonies de funérailles.
Dans la vie, chaque chose a son heure et son temps. Il y a un temps pour venir et une heure pour partir. Quand bientôt la « baraque polonaise » sera démolie jusqu’à la dernière planche, poutre et brique, tout appartiendra au passé… sauf nos souvenirs.
Alles gaat voorbij, behalve het verleden…
In het leven heeft alles uur en tijd. Er is een tijd van komen en er is een uur van gaan.
De tijd is gekomen om definitief afscheid te nemen van Millenium, het kloppend hart van de Poolse migrantengemeenschap in Heusden-Zolder. Het lokaal dat voor de plaatselijke Polen bijna 60 jaar lang de ontmoetingsplek bij uitstek was, werd onlangs verkocht aan een bouwpromotor en zal in de komende maanden gesloopt worden.
Maar wat overblijft van de świetlica polska of « Poolse barak », zoals het oorspronkelijk in hout opgetrokken gebouw doorgaans genoemd werd, is meer dan een hoop stenen, balken en planken: voor de ene zal het de herinneringen en weemoed naar vervlogen tijden oproepen, voor de andere synoniem blijven voor een nostalgische kijk op de kinderjaren.
Even terug in de tijd :
In Limburg kwam de migratiestroom kort na de Eerste Wereldoorlog op gang. De Polen behoorden daarbij tot de vroegste migranten. Het geleidelijke opstarten van de mijnen in het Kempense steenkoolbekken is hier niet vreemd aan.
Vooral vanaf 1923 arriveerden de Polen in groten getale in de Belgische provincie. Ze waren voornamelijk afkomstig uit het Rijnland en Westfalen waar ze tewerkgesteld waren in de mijnindustrie van het Ruhrgebied. Sommigen van hen maakten eerst nog een tussenstop in Noord-Frankrijk of Wallonië. In de jaren daarop werden om de twee à drie jaar door de Belgische mijnuitbaters ook wervingsacties georganiseerd om arbeiders rechtstreeks in Polen te ronselen.
Het waren hoofdzakelijk de geïmmigreerde Ruhrpolen of « Westfalaki » zoals ze zichzelf bestempelden, die een impuls gaven aan de ontwikkeling van het Poolse verenigingsleven in Limburg. Deze pioniers hadden een zekere opleiding genoten en waren reeds vertrouwd met het verenigingsleven in Duitsland.
De culturele, religieuze, educatieve, sociale en sportieve activiteiten die de Poolse associaties organiseerden boden een houvast voor de duizenden Polen die in de loop van de jaren 1920 en 1930 hun bekommerd leven in hun vaderland of de politiek ongunstige situatie in Duitsland hadden achtergelaten. Winterslag, waar de steenkoolproductie in 1917 van start was gegaan, nam met de oprichting van de Poolse Unie in 1923 het voortouw bij het op poten zetten van een netwerk van Poolse organisaties in Limburg. Al snel volgden de overige steenkoolsites in Waterschei, Zwartberg, Eisden, Beringen en Heuden-Zolder (aparte gemeentes tot de fusie in 1977). Vanaf 1947 werd in de kampen in Duitsland een groot aantal Poolse DP’s (displaced persons of oorlogsvluchtelingen) geronseld voor de Limburgse steenkoolmijnen. Velen van hen sloten zich bij de verenigingen aan.
In Heusden en Zolder hadden zich vanaf 1923 slechts enkelingen gevestigd om er mee te helpen aan de uitbouw van de eerste mijnschachten. De mijn van Helchteren-Zolder zou namelijk pas in 1930 in dienst worden genomen. Heusden-Zolder had om die reden voor de oorlog een relatief kleine Poolse gemeenschap, maar het geringe aantal werd ruimschoots gecompenseerd door een uitgesproken dynamische werking. Een afdeling van de Związek Polaków werd er opgericht in 1929 en van de Bractwo Żywego Różańca in 1938. Voor de oorlog had de afdeling ook een sport- en turnclub (Sokół), een schuttersvereniging (Związek Strzelecki) en een Poolse school.
De meeste verenigingen in Heusden-Zolder hernamen na de oorlog hun activiteiten. Door de komst van de DP’s was het aantal Poolse families sterk opgelopen. In de jaren 50 bijvoorbeeld bezochten 80 leerlingen de Poolse school.
De verenigingen hadden geen eigen lokaal. De leden kwamen voor vergaderingen bijeen in lokale cafés of kantines of huurden voor de feestelijkheden zalen af. Daar kwam begin jaren 60 verandering in. Onder impuls van de toenmalige voorzitter van de Związek Polaków, Bolek Nowicki, werd op 15 november 1964, heel toepasselijk in de migrantenwijk Lindeman, aan de voet van de mijnterril, een eigen zaal ingehuldigd, waarvoor het mijnpatronaat van Helchteren-Zolder financieel tussenkwam en de bouwgrond en materialen ter beschikking stelde. Naar aanleiding van de festiviteiten rond de viering van het duizendjarig christendom in Polen in 1966 werd de zaal « Millenium » gedoopt.
Toen de zaal in de jaren 70 eigendom van de Poolse Unie werd en een grondige renovatie onderging, had ze al een haast mythische status verworven, dankzij de frequente activiteiten en ontmoetingen die door de jaren heen werden georganiseerd. Naast de viering van christelijke en nationale feestdagen (die werden opgeluisterd met optredens, steevast gevolgd door het traditionele bal of zabawa) en de Poolse lessen op zaterdagvoormiddag die ononderbroken tot 2008 doorgingen, was het ook de ontmoetingsplaats voor de Poolse scouts, het zangkoor Św. Grzegorza en de dansgroepen: de KSMP-jeugd in de jaren 60 en 70 en Millenium, een groep jonge volwassenen, eind jaren 70 en 80 (die overigens ook een sportclub was).
Successen kende ook de toneelgroep die sinds 1947 toneelvoorstellingen verzorgden tijdens de jaarlijkse Limburgse toneelwedstrijd en daarbij geregeld in de prijzen viel.
De świetlica vergezelde de Polen uit Heusden-Zolder en omstreken ook bij andere gelegenheden: gezellig samenzijn (wieczorki) rond een bord kapusta of goląbki en een glas wódka, heugelijke gebeurtenissen, bruiloften, communie-feesten, verjaardagen…. In de laatste jaren jammer genoeg ook meer en meer bij koffietafels na begrafenissen.
In het leven heeft alles uur en tijd. Er is een tijd van komen en er is een uur van gaan. Wanneer weldra de laatste balk, plank en baksteen van de “Poolse Barak” tegen de vlakte gaat, zal alles tot het verleden behoren… behalve onze herinneringen.
15/08/2022 – Piotr Rozenski
Commentaires :
André Karasiński : Bravo à toi, Piotr. Excellent survol, précis et complet, de l’histoire centenaire de l’immigration polonaise dans le Limbourg. Ta conclusion est émouvante mais tellement vraie : les souvenirs de la communauté polonaise du Limbourg, vos souvenirs, nos souvenirs à tous, Polonais de Belgique, ne disparaîtront pas. Et tu y auras contribué.
Czegoś bardzo ważnego zapomniałem dodać Piotrze, dziękuję !
Betty Nowicki : Waah des souvenirs à couper le souffle …merci.

( ? ) ; Grzegorz Rozenski, et deux des immigrants pionniers, les « Westfalaki » Leon Lukaszewicz et Piotr Nowak dans la cantine « Chez Léon », quand la communauté polonaise ne disposait pas encore d’une propre salle.
Commentaires :
Regina Gymza : Ce « Léon » était mon grand-père, le papa de ma maman ( né en 1902 en Ruhrgebiet en Allemagne et a déménagé à Winterslag en Belgique après la première guerre mondiale ).
Stefan Broniecki : Pan Rzezniczak ( ojciec Leona Rzezniczaka ).

Inauguration de la salle polonaise dans le quartier de Lindeman. E.a. Rektor ks. Repka, Grzegorz Rozenski, le bourgmestre d’Heusden Jef Aerts, le président du ZPB Bolek Nowicki et sa femme Halina Tomaszewski, Edward Pomorski.


Novembre 1965 ( article du Narodowiec ), des élèves de l’école polonaise devant la salle Millenium.

Staand / debout : Broniecki Stefan, Toklowicz Heniu, Goliński Tadek, Hadrysiak Bogdan, Czerwiec Krzystof, Danko Heniu, Rospondek Zdzisiu, Kępa Jerzy, Komendant Prokop Jan z Anglji ; Komendant Dulak Mietek, voor hem / devant lui : Ciszewski Heniu, Smolak Jozef. Gehurkt / accroupis : Goliński Edward, ( ? ), Góral Jan, Kenski Jan.

1966, l’école polonaise avec le « Maître polonais », Grzegorz Rozenski. Elzunia et Joziu Rozenski, ( ? ), Zosia Krol, ( ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ? ), Eddy Goraj.






2009. La salle polonaise « Millenium », au pied du terril.
Commentaires :
Betty Nowicki : Mon enfance.

