Nous avons pris l’habitude d’évoquer ensemble toutes sortes de sujets, et plus particulièrement ceux qui concernent tout ce que nous avions à Comblain. Jamais, jusqu’ici nous n’avons parlé de ce que nous n’avions pas ! Vous me direz : « Quel intérêt de perdre son temps à discuter de quelque chose qui n’existait pas ? ». Pourtant, j’ai envie, ce matin, de vous entraîner sur le sujet de l’absence …
Le début des années soixante a été marqué par l’apparition ( que dis-je l’apparition, l’invasion ), dans tous les foyers du monde civilisé, de la télévision. Nous avons été la première génération d’enfants qui ont eu une télé à la maison. Très vite, ce nouvel équipement est devenu le centre d’intérêt et l’objet de toutes nos préoccupations. Bien sûr, les émissions n’étaient pas encore diffusées en continu … il fallait attendre l’heure du début d’antenne ; notre impatience nous faisait souvent regarder la « mire » durant de longues minutes. N’empêche que c’est tout notre mode de vie qui a été bouleversé. Dorénavant, toutes les soirées étaient conditionnées par la curiosité de savoir ce qui passerait dans le petit écran. Nous sommes vraiment les « enfants de la télé » et même les « premiers enfants des premières télés ». Mais quand on débarquait à Comblain … plus de TV !
Aujourd’hui, vous imaginez-vous des vacances sans télévision ? La moindre chambre du moindre hôtel, le plus modeste soit-il, est pourvu d’écran plat. C’est la même chose dans les gîtes, les chambres d’hôte, les auberges. Même les campings sont équipés de grands écrans pour ne pas rater tel ou tel match, ou telle ou telle finale de concours plus ou moins intéressants ou … plus ou moins débiles.
À Comblain-la-Tour, il n’y avait pas de télévision. Et pourtant, nos séjours ne nous ont jamais paru « monacaux » ( cet adjectif est à prendre ici dans le sens de monastère et n’a rien de commun avec un certain rocher et une certaine Stéphanie de même nom ! ). Ceux qui débarquaient pour la première fois étaient étonnés … mais très vite on s’habituait à vivre « sans ». Au contraire, c’est l’absence de télévision qui a permis de créer des liens uniques.
Du coup, cette absence faisait que nos soirées étaient rythmées par deux options : avec ou sans ognisko ?
Les soirées sans feu de camp devenaient des espaces de liberté. C’était la seule fois de la journée que nous étions libres de faire ce que bon nous semble. Le reste du temps, les activités s’enchaînaient, dès le réveil, à une cadence infernale … c’était « pobutka » … débarbouillage … levée du drapeau … déjeuner … remise en ordre de la chambre … première promenade de la journée, la plus longue … dîner … sieste … deuxième promenade … goûter … troisième randonnée … souper … et enfin … un peu de temps pour soi. On en profitait pour prendre possession du parc ; pour s’y disperser, pour changer de groupe, pour découvrir ceux qu’on avait croisés durant la journée, mais qui étaient allé se promener autre part. C’est là que les véritables affinités se forgeaient. C’est là que l’alchimie de l’amitié distillait ses savants dosages qui faisaient de celui-ci « notre meilleur ami » ou de celle-là « notre âme sœur ». La douceur de la soirée et l’obscurité qui s’installait lentement semblaient sceller des pactes invisibles mais définitifs.
Les soirées avec feu de camp écourtaient ces instants magiques de liberté pour nous rassembler autour de l’ognisko. Pourtant, personne ne considérait cette dernière activité de la journée comme une contrainte … au contraire.
Sans doute qu’être dehors quand il faisait déjà noir, qu’être assis autour d’un brasier, avec des flammes gigantesques, qu’être entouré par ses nouveaux amis, et partager ensemble des moments d’exception, nous apportaient ce petit frisson supplémentaire et l’impression de vivre des minutes dont on se souviendrait encore 40 ans plus tard … la preuve.
Ceci dit, il nous faudra bien – bientôt – comprendre que tous les plaisirs ont une fin ! Il nous faudra apprendre à passer le relais, à offrir à d’autres la possibilité de prendre la relève … à accepter de passer de « l’actualité » aux « archives » … en un mot : « de rendre l’antenne » ! Alors pour paraphraser Mr Léon Zitrone, je dirais : « A vous Comblain-la-Tour ».
05/08/2019 – JP Dz
Commentaires :
Anne Wuidar : Tes dernières phrases laissent-elles augurer de la fin de ces retrouvailles à Comblain, Jean-Pierre ? Il n’y a pas très longtemps que je participe à ces denières mais c’est à chaque fois une telle joie !!! La perspective de devoir me passer de la chaleur et de la belle humeur de chacun d’entre vous m’attristerait profondément. Même si je ne comprends pas les paroles des chansons, j’ai plaisir à chantonner en votre compagnie autour du feu, dans la clairière, où chaque fois la même magie opère. Chacun de vos visages est entré dans mon cœur et je vous remercie de m’avoir si bien accueillie et intégrée. Grâce à vous, toutes et tous, grâce à tous ces petits papillons souvenirs que tu partages, Jean-Pierre, je me sens riche d’une sève qui m’épanouit. Bises à tous, mes amis !
JP Dz : Merci Anne, c’est très gentil. Tu sais, si ces rencontres t’ont tant plu, c’est que les Anciens de Comblain c’est avant tout un « énorme enthousiasme » … Mais le plus grand ennemi de l’enthousiasme, c’est la routine ! Et si on n’y prend garde, la routine c’est le plus court chemin vers la lassitude. Ce serait dommage ! Je pense que c’est Voltaire qui disait : « Les choses ont souvent besoin d’être quittées pour être bien senties. ». Il faut donc prendre le risque, de temps en temps, de changer de direction. D’autant plus que j’ai souvent le sentiment d’être trop envahissant, trop pesant. Je déteste ma gravité. À présent, j’ai surtout envie de Vous écouter, de Vous entendre et de Vous lire ! Nous en reparlerons lors de notre week-end des ACLT, le 31 août, d’ici là, il y a encore 3 semaines …
Alice Golusinski : Bonjour … je me disais bien que tes mots prenaient ce sens … mais dans chaque groupe … quel qu’il soit il y a un meneur … tu écris et gères ce groupe comme personne pourrait le faire … encore ce matin tu m’as mis les larmes aux yeux avec la chanson de Renaud et tes mots si beaux envers ta maman …
Je ne vais plus à Comblain … mais en te lisant c’est un peu comme si je retrouvais cette enfance à jamais perdue … et qu’est-ce que ça fait du bien !
Merci pour ta belle plume, tes mots si justes … tes souvenirs si intenses …
Je me permets de te dire ces mots ici et non en privé … car tout simplement envie de le dire haut et fort … je ne te connais que par tes écrits … mais mes lundis ne se passeraient plus au soleil … comme le disait cloclo … si tu t’arrêtais de publier tes belles chroniques !
Bravo et merci.
Janina Urbanek : Très juste et beau commentaire Alice, je ressens la même chose ainsi mes souvenirs sont encore plus intenses.
1.815 : COMBLAIN-LA-TOUR : Ognisko : Géniu Bujanowski ; ( ? ) ; Mr Joseph Szczepanski ; Mr Andreï Makarow ; ( ? ) ; Christian Szczepanski, 2ème avec les bras croisés ; … ; ( ? ).






