On peut réellement se poser la question : « Mais qu’est-ce qui faisait courir tous ces jeunes ? ». Pourquoi, à un moment donné et pour une heure précise, ils convergeaient tous vers le 33 de la Rue des Anglais à Liège ?
Ils venaient d’Alleur ; Ans ; Bierset ; Bressoux ; Chaudfontaine ; Chênée ; Cheratte ; Cointe ; Glain ; Grâce-Berleur ; Grâce-Hollogne ; Hermalle-sous-Argenteau ; Herstal ; Heure-le-Romain ; Jemeppe ; Juprelle ; Liège ; Montegnée ; Retinne ; Saint-Nicolas ; Seraing ; Spa – Nivezé ; Tilleur ; Visé ; Vottem ; Wandre, … tout ça pour répéter des danses et des chants polonais qu’ils s’apprêtaient à donner en spectacle. Il fallait qu’ils soient sacrément motivés !
En plus, ils n’étaient même pas payés pour leurs prestations, ni pour leurs déplacements et ne prétendaient à aucun « jeton de présence » ! Au contraire … ils devaient payer une cotisation pour avoir le plaisir de faire partie du KSMP de Liège. Et pourtant, ils se bousculaient au portillon ! C’était une époque extraordinaire. Pensez-vous que ce soit encore possible aujourd’hui ? Mais je vous parle d’un temps que les moins de 20 ans …
Des vents favorables m’ont confié quelques-unes des archives du « skarbnik » du KSMP de Liège ; archives qui datent entre 1966 à 1973. C’est là que j’ai relevé les villages qui sont cités plus haut. Ces documents reprennent scrupuleusement des listes de membres, leurs adresses précises, dates et lieux de naissance, ainsi que les cotisations de chaque membre. Je peux vous dire qu’on ne rigolait pas en ce temps-là !
Je me suis longtemps demandé comment « exploiter » ces archives ? Les temps ont changé. Aujourd’hui, le simple fait de faire une liste – la plus banale soit-elle – peut nous causer pas mal de problèmes. Il faut se méfier de tout et je plains sincèrement ceux qui s’aventurent encore dans des études d’historien … Vous verrez que d’ici peu, on va finir par enlever, au burin, les noms de ceux qui sont gravés sur les stèles commémoratives de nos monuments aux morts… pour ne pas perturber leur vie privée ! Et si ça vous fait sourire, faite attention de ne pas vous faire repérer… nous sommes rentrés dans l’ère de l’« inquisition 3.0 ». Finalement … on riait plus avant … on riait mieux !
Bref, il me paraît impossible de partager des renseignements « personnels » … même s’ils datent de plus de 50 ans. Tout au plus, j’ose vous présenter quelques fragments de listes « expurgées » ne reprenant uniquement que des noms de membres actifs. Pas de dates de naissance, ni d’adresse, et encore moins de montants payés pour la cotisation. Je peux encore vous dire que les dates de naissance vont de 1933 à 1959, avec une concentration fin quarante et début cinquante. Pour le reste, heureusement qu’il y a des photos ( merci Helena, Edward, et tous les autres ).
Pour être de bon compte ( si j’ose dire ), je me dois d’ajouter que ces jeunes qui se précipitaient le samedi soir aux répétitions du KSMP ne couraient pas tous vers la Rue des Anglais … D’autres couraient vers le Cercle Saint-Louis à Tertre ( et avant ça, vers le salon du Charbonnage à Hautrage-Etat ), vers le Foyer polonais de Ressaix ou vers d’autres locaux à Charleroi, à Bois-du-Luc, à Heusden-Zolder, à Maasmechelen, … Et c’est la même motivation qui les faisait courir.
Et c’est sans doute encore la même qui nous a rassemblés ici tous les lundis matin.
31/05/21 – JP Dz