« Quel rapport avec les Anciens de Comblain-la-Tour ? » me direz-vous.
Laissez-moi vous esquisser en quelques lignes l’histoire du Lycée polonais Cyprian Norwid de Villard-de-Lans.
En octobre 1940, sous l’impulsion de Zygmunt Lubicz-Zaleski, délégué en France du ministère polonais de l’Instruction publique, aidé par Wenceslas Godlewski, lecteur de langue polonaise à l’université de Lille, est créé le Lycée polonais Cyprian Norwid à Villard-de-Lans, en zone libre. Les cours sont dispensés en langue polonaise et se basent sur les programmes des écoles d’enseignement secondaire de la Pologne d’avant-guerre. À ces cours de base s’ajoute un enseignement approfondi de la langue et de la littérature française (cinq heures par semaine).
Les élèves suivent un cursus secondaire organisé en deux cycles : les quatre premières années sont sanctionnées par le « Mała matura » ; au terme des deux années terminales, les élèves passent le « Matura », reconnu équivalant au Baccalauréat par les autorités françaises.
Entre 1940 et 1946, le Lycée va accueillir des filles et garçons provenant de diverses origines : des jeunes soldats polonais ayant pris part aux campagnes de Pologne, de Norvège et de France, des évadés des camps de prisonniers, les enfants des réfugiés polonais arrivés en France en 1939 et 1940, les enfants des émigrés d’avant-guerre établis dans les bassins miniers,…
Les cours du programme de base sont donnés par d’anciens professeurs et chargés de cours venus d’universités polonaises. Les cours de français par des enseignants autochtones. Le Lycée comptera chaque année quelque deux cents élèves en moyenne (cent vingt-cinq en 1940 et deux cent trente en 1946).
Après la fin de la guerre et la reconnaissance par l’Ouest du gouvernement communiste, Varsovie envoie un émissaire, nommé vice-directeur, pour prendre en charge les études sur la Pologne.
Le Lycée Cyprian Norwid de Villard-de-Lans fermera définitivement ses portes au terme de l’année scolaire 1945-46. Une partie des élèves continueront leur scolarité au Lycée Polonais à Paris, d’autres rejoindront des lycées français pour éviter un établissement considéré comme soumis à Moscou.
Mais quel est donc le rapport avec Comblain ?
Dans le livre qu’a consacré au Lycée un de ses anciens, Tadeusz Łepkowski, j’ai pu lire : « Presque dès l’instant où, en 1946, le lycée fut transféré à Paris… les « Villardiens » envisagèrent d’écrire son histoire, désormais achevée, de laisser un témoignage sur eux-mêmes. La plupart d’entre eux avaient à l’esprit de raconter l’histoire du Villard polonais, et non celle, réécrite pour les besoins propagandistes des autorités de la nouvelle Pologne populaire,… ».
N’est-ce pas ce à quoi nous invite aussi Jean-Pierre Dziewiacień ? Écrire notre histoire, celle de l’émigration polonaise en Belgique, celle de nos cités minières, de nos organisations, de nos fêtes et commémorations, celle de nos colonies de vacances, telles que nous les avons vécues, ressenties. Faisons-le avec ce qu’il faut de subjectivité, voire de mauvaise foi mais surtout avec notre cœur et nos tripes. Aidons Jean-Pierre à compléter ce livre, témoignons, racontons ; laissons une trace qui ne pourra être dévoyée. Merci mille fois à toi, Jean-Pierre. Félicitations et courage.
D’autres liens existent entre la communauté polonaise de Belgique et Villard-de-Lans : l’abbé Kazimierz Czajka y a été professeur, Zofia Kułakowska-Wajs et Anna Gralla, élèves. Mais ce sera pour une prochaine publication.
15/09/2020 : André Karasiński
SOURCES
TADEUSZ ŁEPKOWSKI, Une école libre polonaise en France occupée, © Mémoire du Lycée Cyprian Norwid – Villard-de-Lans (1940-1946), juin 2013. http://www. http://www.lycee-polonais.com
MONIKA SALMON-SIAMA Chapitre 24. Le lycée polonais Kamil Cyprian Norwid de Villard de Lans. Un lycée pour les Polonais dans le Vercors.
https://books.openedition.org/septentrion/7231?lang=fr