Combien de fois n’avons-nous pas chanté Hej, do apelu ? C’était l’hymne des KSMP. C’était notre façon à nous d’appeler de nos vœux un monde meilleur …
Hej, do apelu stańmy wraz
Pour cet appel, levons-nous ensemble
Budować Polskę Nową.
Construire une Pologne Nouvelle.
Ojczyzna droga woła nas,
La chère patrie nous appelle,
Do pracy ręką, głową.
Pour travailler avec nos mains, nos têtes.
Nie wydrze nam jej żaden wróg,
Aucun ennemi ne nous retiendra,
Tak nam dopomóż Bóg.
Que Dieu nous vienne en aide.
Avons-nous réussi à rendre le monde meilleur qu’il ne l’était avant notre arrivée ? Pas sûr … Mais en tout cas on a essayé. Et Comblain-la-Tour peut être fier de ce que nous sommes devenus. Ces bambins qui couraient dans le parc, ces garnements qui grimpaient dans l’arbre aux singes, ces ados qui rêvaient d’escalader l’échelle de secours, sont devenus des hommes et des femmes … des parents et des grands-parents.
La génération de nos parents a trouvé sa place … la nôtre ne s’est pas contenté de trouver la sienne … elle a imposé sa différence … cette façon toute particulière de s’intégrer parfaitement dans son environnement tout en gardant notre âme polonaise. Et c’est une réussite totale.
Aujourd’hui, ces enfants-là sont devenus docteurs, juges, avocats, ingénieurs, enseignants, infirmières, … On les retrouve à des postes importants dans la police, dans la justice et dans les ministères belges et régionaux. Ils sont chefs d’entreprise, cadres, secrétaires, techniciens, responsables, ouvriers qualifiés, … D’autres ont choisi de s’épanouir dans des domaines artistiques et s’y sont révélés. D’autres enfin, ont choisi de concentrer toutes leurs forces pour s’occuper exclusivement de leur famille et l’inonder de tendresse et d’affection. Tous nos talents ont explosé. Toutes nos prédispositions se sont affirmées. Aujourd’hui, nous sommes partout et tellement bien intégrés qu’on ne nous voit nulle part. Seuls nos patronymes parfois nous trahissent … et encore … ils sont souvent synonymes de compétence et gage de sérieux.
Et même si nous avons un peu perdu des finesses de la langue de Mickiewicz … même si quelques mots parfois nous échappent, surtout quand vous parlez trop vite en polonais … ou « trop bien » … rassurez-vous … nos pieds s’agitent toujours à chaque fois que nous entendons quelques mesures de musique polonaise, nos glandes salivent toujours quand on sent l’odeur des gołąbki ou des kluski, nos yeux s’illuminent encore quand on voit des couples de Krakowiak entrer en scène … et les paroles des chansons qu’on a apprise à Comblain ne s’effaceront jamais de nos mémoires. Nos gènes polonais sont indestructibles.
Chaque fois que je regarde des photos de nous, jeunes, en costumes folkloriques – et quelle que soit l’organisation à laquelle nous appartenions – je pense à ces vers de Verlaine : « Qu’as-tu fait, ô toi que voilà pleurant sans cesse, dis qu’as-tu fait, toi que voilà de ta jeunesse ? ». Eh bien nous … notre jeunesse, on en a fait ça ! Oui, Comblain-la-Tour devrait être fier de ce que nous sommes devenus.
30/03/2020 – JP Dz












Commentaires :
Milczanowski Véronique : Oui Jean-Pierre, nous pouvons être fiers de ce que nous sommes devenus … Et nos parents le sont aussi tellement … Où qu’ils soient …
André Karasinski : Beau texte, Jean-Pierre, comme d’habitude. Tu es parvenu avec des mots justes et des phrases précises et pudiques à traduire ce que ressentent beaucoup des Polonais belges ou Belges polonais nés en Belgique après la guerre.
Anne Wuidar : André Karasinski a très bien résumé ma pensée, encore merci Jean-Pierre !
Christine Mironczyk : Belle expression, idée profonde et sincère.