Nous, quand il faisait trop chaud et qu’on avait envie de se rafraîchir, nous avions plein de possibilités.
On allait patauger dans l’Ourthe … on trempait nos pieds dans le ruisseau du Boé … on se réfugiait dans l’ombre des bois … on improvisait des batailles d’eau … on s’arrêtait au café des sports, ou chez Tintin, ou à la buvette du camping … on se ruait sur les glaces à l’eau de Monsieur Bardo … ou on piquait un plongeon dans une piscine privée ( voir article à paraître prochainement. Tremblez jeunes filles ) mais elles, comment faisaient-elles ?
Entassées – à longueur de journée – dans cette minuscule cuisine, à préparer la soupe, à cuire les légumes, à rôtir la viande, comment faisaient-elles pour se rafraîchir ? Elles devaient vraiment souffrir des chaleurs des mois de juillet et d’août. Les avez-vous souvent entendus se plaindre ? Moi, jamais.
Je pense qu’elles se rafraîchissaient à nos sourires. Leur en avons-nous donné assez ?
Non seulement elles passaient leurs journées à nous préparer l’essentiel, mais étaient toujours prêtes à donner encore plus. Quand nous allions discrètement à la cuisine pour avoir un supplément de ceci ou pour goûter, avant les autres, un peu de cela, elles n’hésitaient pas à enfreindre les règles … juste pour nous faire plaisir.
Et quand la chef cuisinière se mettait à râler, on avait droit à un clin d’œil complice, comme pour dire « Ne t’inquiète pas, elle râle seulement pour la forme ». On ressortait, rassuré, en se disant qu’on avait des alliés dans la place.
Leur avons-nous dit, assez souvent, « Merci » ?
Parmi elles, il y avait les « vedettes », celles que tout le monde connaissait leur nom, parce qu’elles étaient très souvent là ou parce qu’elle était la maman d’untel ou la grand-mère d’unetelle, et puis les autres … les moins connues … les plus discrètes … celles qu’on appelait pudiquement « Pani kucharka prosze » parce qu’on ne connaissait même pas leur nom … celles qui restaient anonymes. Sans doute qu’elles aussi auraient aimé qu’on prenne la peine de retenir leur nom.
Combien d’entre elles ont fêté leur anniversaire, pendant les colonies, sans que nous leur chantions « Sto lat » ?
Et au moment du départ, quand l’émotion nous submergeait et qu’on serrait dans nos bras nos amis, nos petites amies, nos frères … combien d’entre nous ont pensé aller à la cuisine pour embrasser, une dernière fois, les cuisinières ?
Je ne sais pas vous, mais moi, j’ai comme un regret.
Si c’était à refaire … je les serrerais très fort … jusqu’à ce qu’elles comprennent qu’on ne les oubliera jamais.
16/05/2015 – Jean-Pierre Dziewiacien






