La pluie et l’orage sur Comblain :
Allumez le feu… c’était à Comblain-la-Tour une prérogative du chef moniteur ; ce qui n’était pas forcément, à tous les coups, une partie de plaisir.
L’« Ośrodek Wakacyjny Millennium » a beau être une terre polonaise – peuplée de polonais – il n’en est pas moins situé en Belgique, où l’averse passagère succède souvent à la pluie intermittente.
Trouver du bois sec relevait, bien des fois, d’un exploit aussi difficile que de prédire une météo favorable pour un feu de camp. Mais que serait une colonie de vacances sans feux de camp.
L’utilisation d’essence, bien que formellement interdite, était régulièrement le dernier recours.
Sur la photo 105 : je m’efforce d’allumer le feu en l’arrosant d’essence ! Alexandre Persich, à mes côtés, surveille la manœuvre.
Sur la photo 106 : Ks Kurzawa vient constater de visu l’acharnement du feu à rester éteint.
Les jours de pluie à Comblain étaient des jours tristes. Impossible d’aller se promener, d’aller patauger dans l’Ourthe, de jouer dans le parc,…
La maison était alors envahie d’enfants. On ressortait les jeux de société. Partout, dans le réfectoire, dans le hall d’entrée, sous le porche, des petits groupes se formaient autour des mikados, des puzzles et des jeux de carte.
C’était le bon moment aussi pour écrire aux parents. Les enfants s’appliquaient. Mais l’imagination manquait ; alors on s’échangeait les phrases : « T’as qu’à dire qu’hier on a été jusqu’à Xhoris et qu’on s’est perdu en revenant. Même qu’on est rentré en retard à la colo, et même que les cuisinières n’étaient pas contentes ». « Moi, j’ai raconté que le groupe de garçons avait été puni parce qu’ils étaient toujours en retard pour la prière du soir ». « Moi, j’ai juste demandé de m’envoyer un peu d’argent pour aller au marché de Comblain-au-Pont ».
Il faut bien avouer, ce sont surtout les petites filles qui écrivaient. Les garçons,…
C’était le moment où la petite échoppe de Mr Bardo fonctionnait le mieux. On pouvait y acheter des timbres, des cartes postales, mais aussi des bonbons, des boissons et des glaces à l’eau.
Tout le monde essayait de s’occuper. Mais chacun avait un œil sur son occupation et un œil vers la fenêtre.
Dès que le soleil faisait mine de percer, les jeux et les papiers à lettres disparaissaient comme par miracle. Tout le monde se retrouvait dans le parc. L’herbe mouillée ne faisait peur à personne. On s’y installait sans retenue. L’important c’était d’être dehors.
Dans le parc, on se laissait envahir par un mélange d’odeurs délicieuses d’ozone, d’herbe mouillée et de liberté.
Et que dire de l’orage…
Qui d’entre nous n’a jamais vécu une soirée d’orage à Comblain-la-Tour ?
Dans cette vallée encaissée, les éclairs semblaient se répondre. C’était fracassant, assourdissant, grandiose.
Nous étions entassés à l’intérieur, souvent dans le hall. On regardait, par la fenêtre, les éléments se déchaîner. On entendait des « Oh », des « Aaaah », des « Waouh », des « J’ai peur ».
Et les filles se rapprochaient, pour avoir moins peur. Et nous les serrions dans nos bras.
Les garçons aimaient beaucoup les soirées d’orage à Comblain-l’Amour.
Mais connaissez-vous cette légende qui circule depuis longtemps dans le village de Comblain ?
Ça se passe à l’endroit du « Tourniquet » – photos 107, 108, 109 et 110 ; vous connaissez tous cet endroit. C’est là que l’Ourthe est la plus tumultueuse ; en allant vers la source, c’est juste derrière la série de chalets qui cachent à présent les remous.
On raconte qu’un radeau s’y est englouti, un soir de Noël : c’est Le mystère de la cloche de Saint-Laurent.
Le Tourniquet, en amont du village ( aussi appelé « Trou Lucas » ) a toujours été un passage difficile pour ceux qui tentaient de naviguer sur l’Ourthe. C’est donc là, qu’un soir de Noël, le radeau du mécréant Materne ( je vous jure que je n’invente rien ) a sombré au pied des « Tartines » ( les « Tartines » est le nom que l’on donne aux rochers étroits et verticaux qui ont l’air d’être alignés, comme des tranches de pain dans un grille-pain, derrière le rocher de la Vierge ).
C’était un soir d’orage et l’Ourthe était particulièrement agitée ; le bateau de Materne était devenu incontrôlable ; au lieu de prier et d’invoquer la Vierge, Materne s’est mis à blasphémer… le naufrage était inévitable.
Depuis lors, la cloche de Saint-Laurent gît au fond de l’Ourthe et protège Comblain-la-Tour contre la foudre ;
on dit aussi que cette cloche tinte encore les soirs de la nativité.
Les moins rêveurs, prétendent que l’air froid de Noël est tellement dense que c’est en réalité le son de la cloche de Hamoir qui descend avec l’Ourthe. Quant à ceux qui ont perçu à maintes reprises le son cristallin de cette cloche, ils vous jurent qu’il provenait du milieu de la rivière, non loin du « Tourniquet ».
Ceux qui défendent la légende disent que : « Depuis lors, on ne se souvient pas d’un coup de foudre à Comblain-la-Tour… sauf à la Saint-Valentin ».
Nous, on se souvient de beaucoup de coups de foudre ; et pas qu’à la Saint Valentin.
Il y avait ceux qui résonnaient dans la vallée les soirs d’orage. Ils étaient fracassants
Et il y avait ceux qui fracassaient nos petits cœurs… et ils étaient attendrissants.
31/08/2015 – Jean-Pierre Dziewiacien – https://anciensdecomblain.com/





