On se souvient tous de nos promenades quotidiennes aux alentours de Comblain-la-Tour. Mais de temps en temps, on partait – à pied – plus loin … beaucoup plus loin.
Le plan 1.239 montre l’étendue du théâtre de nos aventures. Et ce n’est pas rien. Personnellement, les deux destinations les plus lointaines que j’ai eu le « privilège » de réaliser à pied, c’était Anthisnes et Aywaille. Je pense n’avoir été qu’une seule fois aux deux endroits.
Bien sûr, ce genre d’expédition était rare et réservée aux plus grands. Il fallait partir pour la journée complète, juste après le déjeuner et revenir pour le souper. On embarquait alors un viatique suffisant pour ne pas dépérir en cours de route. Le chemin était particulièrement long … surtout jusqu’à Aywaille.
L’anecdote qui m’est restée, c’est lors du périple à Aywaille. Nous étions un groupe composé exclusivement de garçons ; les filles auraient-elles été capables d’aller si loin ? ( Je vous imagine déjà en train de m’injurier derrière votre écran de PC … C’est jubilatoire. Je sais déjà que vous vous vengerez … mais, tant pis, je profite pleinement de l’instant présent ). Bref, nous étions enfin arrivés au centre d’Aywaille, non sans pester sur l’idée absurde d’avoir relevé ce défi. On était complètement crevé.
On est rentré tous dans une libraire, peut-être pour voir si nous pouvions acheter à boire. Il y avait là le patron et un client. Machinalement, certains d’entre nous se sont mis à feuilleter des bandes dessinées qui étaient exposées. Tout à coup, le patron s’est mis à hurler … surtout à l’encontre de Pierre Bartnik … en criant : « les livres doivent être achetés pour être lus … c’est un scandale d’avoir un pareil sans gêne ». Pierre s’est demandé ce qu’il avait fait de mal, et nous tous, on ne comprenait pas l’attitude du commerçant !
Pour faire baisser la tension, j’ai dit, en polonais, à Pierre : « Powiedz mu niech pocałuje mnie w du … ».
A ces mots, le client du magasin a éclaté de rire. Visiblement, il comprenait aussi le polonais. Nous sommes tous ressortis de la librairie, le client aussi, et on a aussitôt sympathisé.
Il nous a tous invité à boire un verre dans un bistrot tout proche. On a dû lui expliqué ce qu’on faisait là, qui on était, d’où nous venions, etc … Il ne connaissait pas Comblain-la-Tour et était étonné de voir de jeunes polonais dans un coin aussi reculé des Ardennes. Après deux verres, on s’est quitté en riant encore sur les circonstances de cette rencontre.
Le retour a été pénible aussi. La route était décidément très longue. Mais une idée agréable nous permettait de tenir le coup : après un tel exploit, nous serons accueillis comme des héros … surtout par les filles. On se voyait déjà acclamés dès notre entrée dans le centre ; on nous demanderait nos impressions ; on épongerait nos fronts ; on nous servirait des boissons fraîches … et la soirée serait douce sous les caresses de nos admiratrices …
Oui, ça, c’était seulement un rêve. En fait, on est rentré dans l’indifférence générale ! Personne ne nous a rien demandé ! C’est à peine si notre absence avait été constatée ! On n’avait manqué à personne ! Pire, les garçons qui n’étaient pas venus nous accompagner ( ceux que nous avions pris pour les moins courageux ), étaient restés sur place … avec les filles. Ils avaient profité de notre absence pour « concrétiser » !
Bref, c’était nous les pigeons … voyageurs certes … mais pigeons quand même.
Quant à l’inconstance des filles … nous avons eu la soirée entière pour y méditer … entre garçons.
04/06/2018 – JP Dz






